Je médite, donc je maigris ?

Perdre du poids grâce à la méditation et à la pleine conscience, est-ce vraiment possible ? L’idée est en tout cas séduisante. Géraldine Desindes propose un programme « Manger et Vivre en Pleine Conscience » et nous explique l’incidence de la méditation sur notre rapport à l’alimentation.

Si l’on connait de mieux en mieux ses vertus anti-stress et son influence positive sur nos capacités psychiques et notre santé au global, la méditation, peut-elle venir à notre secours sur la balance ? De plus en plus de programmes minceur (applis, cures de thalassothérapie, thérapies comportementales…) incluent en effet la pratique de la méditation dans leur approche des problématiques liées poids.

Sur son site, Bien Être à Table1, Géraldine Desindes explique par exemple qu’elle partage sa vie professionnelle entre les cours de méditation qu’elle enseigne et le développement du programme « Manger et Vivre en Pleine Conscience ». Convaincue que la pratique de la pleine conscience peut nous amener à transformer notre rapport à l’alimentation, et donc, potentiellement, à maigrir, cette dernière revient avec nous sur l’influence de l’écoute de soi dans la perte de poids.

Perdre du poids grâce à la pleine conscience, concrètement, en quoi cela consiste ?

Géraldine Desindes : La pleine conscience consiste à porter son attention de manière volontaire sur ce qu’il se passe autour et dans soi, avec deux particularités. La première, c’est qu’on ne se focalise que sur ce qu’il se passe ici et maintenant (on laisse de côté le passé et le futur) ; la seconde, c’est qu’il s’agit d’une observation sans jugement ni critique. On observe simplement, sans rien faire, sans catégoriser.

Le programme, d’une durée de 8 semaines, est donc basé sur cette reconnexion à soi-même, à ses sensations. À l’origine, il a été élaboré par le Docteur et Moniale Zen Jan Chozen Bays2 et Char Wilkins, psychiatre et formatrice MBSR (Programme de Réduction du Stress par la Pleine Conscience), deux femmes respectivement qui ont vu défiler toutes les modes en matière de régime alimentaire et qui se sont aperçues de leur danger. Au-delà de la minceur, on est d’abord dans le bien-être, par la méditation et la pleine conscience.

Comment la méditation peut-elle avoir une incidence sur notre alimentation ?

G.D. : Premièrement, la pleine conscience permet de réduire le stress – qui, on le sait, induit bien souvent des prises alimentaires compulsives. Au bout de 15 minutes de méditation quotidienne, des études le prouvent, on observe déjà une réduction de ce stress.

Cette technique permet de reprogrammer petit à petit le cerveau avec de nouvelles habitudes. On prend son temps, on mange lentement, on mâche bien les aliments, pour ressentir une véritable satisfaction. L’objectif est d’apprendre à être présent pour savourer pleinement.

Quand on est un nourrisson, on est très instinctif (ndlr : par exemple, on s’arrête de manger lorsqu’on n’a plus faim). Avec la pleine conscience, on tente de retrouver cette sensation intuitive, cette écoute de soi, qu’on possède naturellement lorsqu’on est bébé.

Quelles sont les bases d’une alimentation en pleine conscience ?

G.D. : L’être humain a été programmé pour faire face au manque, mais aujourd’hui, dans nos sociétés, ça n’a plus beaucoup de sens. Face à la sur-présence de nourriture, il faut au contraire réussir à faire un pas de côté, trouver les limites.

En ralentissant, on a plus de chance de parvenir à sonder son corps et à reconnaitre et séparer la faim d’envie de la faim émotionnelle et de la faim physique.

Il y a 9 sortes de faim : la faim des yeux (que les publicitaires l’ont très bien comprise), la faim du nez, la faim de la bouche, la faim du goût et du toucher (les 5 sens) ainsi que la faim de l’estomac, la faim des cellules (les besoins biologiques de notre corps), la faim de l’esprit et la faim du cœur. Les plus complexes à gérer sont bien entendu la faim de la bouche, de l’esprit et du cœur. Cette dernière évoque les souvenirs, un besoin d’amour ou de bienveillance.

Au quotidien, comment appliquer cette pleine conscience alimentaire ?

G.D. : Une fois que l’on a appris à se (ré)écouter et à reconnaitre ses faims, on va chercher ce qui peut « nourrir » par exemple, nos envies, ce qui nous reconnecte au moment présent (faire de la peinture, aller marcher, voir des amis…)

Pendant le repas, on prend le temps de manger de petites quantités. On se met au calme, on éteint la télé, on ne lit pas, et on prend conscience de ce qu’on mange sans se laisser parasiter par ce qui nous entoure. Ainsi, on ne prend que ce dont on a vraiment besoin pour se nourrir.

Quels sont les principaux bienfaits de l’alimentation en pleine conscience ?

G.D. : En premier lieu, on fait le choix d’une alimentation plus respectueuse de soi-même, puisqu’on cherche à s’écouter. On va donc changer les produits qu’on mange. Ce ne seront pas forcément des produits moins caloriques mais de meilleure qualité. On adopte donc une démarche plus écologique, pour soi et l’environnement.

En second lieu, on agit sur la quantité. On réapprend à manger selon le remplissage de l’estomac et ses besoins physiologiques. Si l’émotionnel est calmé par la méditation, alors on écoute forcément mieux les vrais besoins de son corps. On apprend à observer ses émotions et pensées et à comprendre sa faim émotionnelle (et donc à l’apprivoiser) : qu’est-ce qui me pousse à manger ? Qu’est-ce qui se passe dans mon corps lorsque j’ai une pulsion vers la nourriture ? Si on prend le temps d’observer, son corps, puis ses pensées et ses émotions, on parvient à « saucissonner » cet état et ainsi à lui faire perdre de la force. Ce n’est qu’une pensée et je peux la surmonter.

Comment débuter la méditation pour parvenir (peut-être) à la pleine conscience ?

G.D. : Le livre de Jan Chozen Bays est une bonne base, mais trouver un groupe pour commencer la pratique, ça permet de se sentir entourée et de s’entraider de manière collective. Il existe des cours et des stages pour débuter la pratique de la pleine conscience. Mais chacun, à son niveau, peut commencer par 3 minutes de méditation par jour (ndlr : des tas d’applis existent désormais pour une pratique autonome), pour apprendre à se reconnecter avec soi-même.

Un rapport de cause à effet pas (encore) scientifiquement prouvé

Le Dr Katy Tapper, professeur de psychologie à La City, University of London, vient de publier dans la revue Clinical Psychology Review un article intitulé Can mindfulness influence weight management related eating behaviors ? If so, how ?. Celui-ci s’appuie sur des recherches effectuées pour chercher à démontrer le lien de cause à effet entre la pratique de la pleine conscience et le maintien du poids de forme.

Selon le Dr Katy Tapper, « Nous ne pouvons pas affirmer catégoriquement que l’alimentation consciente est en mesure de faciliter le contrôle du poids. De nombreuses pratiques différentes ont été dénommées des pratiques conscientes, et les effets de chacune d’entre elles sur les comportements alimentaires relatifs au contrôle du poids sont loin d’être établis. Nous devons donc investir dans des études expérimentales mieux contrôlées, avant de développer et de faire connaître de nouvelles interventions pour le contrôle du poids basé sur l’alimentation consciente. »

L’experte souligne néanmoins deux points prometteurs concernant l’alimentation consciente : l’accroissement, grâce à cette méthode, de la conscience des caractéristiques sensorielles des aliments au moment présent et la décentration. En revanche, même si certains programmes de contrôle du poids se sont basés sur la pleine conscience et ont été couronnés de succès, il n’est pas toujours évident que la pratique de la pleine conscience en soit à l’origine.

Affaire à suivre donc.

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