GUERIR L’ENFANT INTÉRIEUR

On dit que les enfants sont l’avenir de l’Homme. Rien n’est plus vrai. Mais n’oublions pas qu’avant d’être le futur de l’humanité, il est dans un premier temps l’individu en devenir. A l’instar des poupées russes, l’enfant que nous fûmes, continue d’exister en nous. La santé du psychisme de l’adulte dépend de la santé du psychisme de l’enfant, du bon déroulement de son développement. Seul un enfant qui va bien, guéri de ses traumas et qui a vu ses besoins fondamentaux nourris, peut devenir adulte, s’épanouir.

Porteurs de vie, spontanés, intolérants à l’injustice, on dit aussi qu’ils sont authentiques, que la vérité sort de leur bouche. Il en va de même pour notre enfant intérieur. Gardien de notre moi véritable, il est le détenteur de nos vérités les plus profondes. Si l’adulte peut s’accommoder de mensonges, l’enfant, lui ne le peut pas et il en va de même du monde des émotions. Il est donc important de réhabiliter notre enfant intérieur, de faire la paix avec lui afin qu’il devienne notre allié et qu’il nous permette de vivre notre vie d’adulte, en toute sérénité.

Réhabiliter son enfant intérieur

Tout ce qui n’a pas été vécu sainement dans l’enfance, tous les traumatismes infantiles, toutes les émotions tues continuent de hanter l’adulte en devenir. Ces fantômes, loin de disparaître, de s’effacer, maintiennent la personne non seulement dans des positions infantiles, mais dans des états de souffrances et de mal-être. Comme des plaies béantes, ces fantômes ne sont pas nos ennemis. Ils ne sont que l’expression de l’enfant intérieur qui cherche à se faire reconnaître pour aller bien, pour se développer. Et il ne le peut tant qu’il reste enchaîner à ce qui a entravé son développement, tant qu’il demeure dans les manques infantiles. D’où la nécessité de réhabiliter l’enfant intérieur qui constitue une partie de notre monde intérieur.

Beaucoup d’adultes s’acharnent contre leur monde intérieur, essayant vainement de le museler car source de souffrances. Ils cherchent, à travers des prothèses extérieures, à faire taire les murmures occasionnés par ces souffrances. Pour ce faire, des addictions de toutes sortes se mettent en place, qu’elles soient vis à vis de substances, d’activités ou de personnes. Ces fuites en avant ne sont que des tentatives pour combler des manques et des vides intérieurs.

Nous sommes le résultat de notre histoire, nous sommes seuls porteurs de nos souffrances et seuls détenteurs de solutions. Il est donc indispensable, pour guérir, de partir à sa découverte, celle de son monde interne, de cet enfant toujours présent en soi.

Pour survivre, s’adapter, l’enfant que nous étions, n’a eu d’autre choix, que subir, se taire. Pour nous affranchir de ses souffrances, il faut donc se réapproprier son histoire, ses émotions si longtemps tues, accorder une place, un droit à la parole à son enfant intérieur blessé. Écouter ce qu’il a à dire, entendre ce qui lui fait défaut. Comme des plaies, nous n’avons d’autre choix que de panser, une à une, ses blessures infantiles afin de faire la paix avec notre passé.

Pour guérir, devenir un adulte heureux, il est donc indispensable de prendre conscience de sa présence, de ce qu’il a à dire, à exprimer et de reconnaître sa propre histoire au lieu de « se blinder », de fuir notre monde intérieur comme le choléra, de chercher vainement des solutions extérieures magiques qui anéantiraient nos souffrances d’un coup de baguette.

Ces solutions n’existent pas. C’est en soi que se situent les fondations de notre être. Les solutions ne peuvent donc que se trouver à l’intérieur de soi, pas dans l’amour d’un autre, dans la rencontre parfaite ou un travail idéal.

Se connaître et se reconnaître pour faire la paix

Freud disait que tout ce qui n’est pas mis en conscience, est condamné à se répéter. Alors tel un disque rayé, les mélodies de notre enfance ne cessent de résonner dans nos fors intérieurs. Elles continuent de se répéter jusqu’à ce que nous acceptions de leur prêter une oreille. Les écouter pour que nous reconnaissions les manques et les souffrances tapies derrière leurs plaintes. Car c’est tout ce que demande notre enfant intérieur. Un adulte à l’écoute, lui accordant la reconnaissance de ses blessures, la reconnaissance de son être véritable. Et c’est ainsi qu’il nous faut aborder notre monde intérieur, en bon parent, celui que nous aurions souhaité avoir et qui nous a si cruellement fait défaut. Personne ne peut l’être à notre place.

Pour cela, il faut accepter de s’aventurer derrière le masque social, celui de l’adulte. Le masque qu’il a fallu nous fabriquer pour pouvoir nous adapter, nous intégrer, être aimé. Prendre le temps de s’arrêter vraiment sur nous-mêmes, accepter de se faire face. L’enfant intérieur s’époumone à dire des choses qu’il a dû taire. Alors, avec compassion, comprendre qu’aujourd’hui, il peut exprimer les peurs, les injustices, les colères qu’il a dû garder. Car voici certainement le premier travail à faire et qui consiste à « rétablir le négatif, le mauvais », les émotions désagréables, car jugées inacceptables. Pour ce faire, il faut nous accorder, avec lucidité, la possibilité d’un « pèlerinage dans son passé », afin d’y retrouver les émotions enfouies, d’exprimer le refoulé, de permettre le deuil de son enfance et de ce qui ne s’est pas vécu pleinement, d’abandonner les peurs et les fausses croyances qui n’ont plus lieu d’être.

Accepter de remettre les responsabilités à chacun. Si nous étions maltraités, nous n’en étions pas la raison, nous avons vécu le résultat de dysfonctionnements psychiques d’individus incapables d’être parent. Si nous avons appris à être « des enfants objets », ce n’est pas parce que nous ne valions pas mieux, mais que nous avons été à la merci de l’égocentrisme de certains parents. Si nous n’avons pas reçu l’amour, la sécurité qui nous était nécessaire, c’est tout simplement parce que notre entourage n’en disposait pas lui-même.

Bien qu’il est malsain de demeurer dans un statut de victime, il est primordial dans un premier temps de se l’accorder, de se reconnaître comme telle. « Toute souffrance reconnue, assumée se métamorphose, se digère. »

Il est d’ailleurs courant que la souffrance véritablement reconnue, acceptée, assimilée apporte un sentiment de soulagement à la personne, qu’elle expérimente un relâchement de la tension interne. Car à chaque révélation correspond la fin d’un combat livré à soi-même. La tension correspondait juste à l’expression d’une lutte entre le Moi infantile qui criait sa souffrance et un Moi adulte qui cherchait à la taire.

Grâce à ce travail sur soi, le deuil de son passé devient possible, une alliance entre le Moi enfant et le Moi adulte est enfin réalisable. Les plaies sont peu à peu pansées. L’enfant intérieur peut demeurer en paix, permettant ainsi à l’adulte de grandir et de vivre sa vie.

Philho Thérapie le 16 mai 2018

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